Revue pour Retour. Jeu pour PlayStation 5, le jeu vidéo est sorti le 30/04/2021
Comme lorsque divers malheurs frappent votre vie tous ensemble, l'un après l'autre, pour former un cycle infini dont il n'y a aucune issue : c'est ainsi que vous vous sentirez en jouant à Returnal. Le désir d'échapper à quelque chose dans lequel vous aimez pourtant vous retrouver, les souvenirs d'un passé orageux qui reviennent cycliquement pour vous tourmenter, l'oppression due à la conscience d'être impuissant, contraint à quelque chose qui vous détruit physiquement et mentalement.
Le titre de Housemarque est un piège, mais vous ne feriez rien pour vous en sortir, Returnal vous tient fermement dans son étreinte d'anxiété agréable dans laquelle vous aimeriez être piégé pour toujours.
Briser le cycle
Le dernier effort de Housemarque n'est pas pour tout le monde, un roguelike stimulant - pour ne pas dire difficile - qui permet au joueur lui-même de découvrir et d'interpréter l'histoire grâce à des éléments de légende tels que des pistes audio, des visions, des écritures et des paramètres. L'incipit de base, cependant, est assez clair : Selene lors d'un voyage dans l'espace fait naufrage sur Atropos, une planète inconnue et apparemment déserte. Malheureusement pour elle, ce sera bientôt l'endroit le plus dangereux de l'univers, avec des races extraterrestres à sa poursuite, des pièges mortels et une boucle sans fin qui ne lui permettra pas de s'échapper. La question du cycle, qui après chaque mort nous fera redémarrer dès l'instant d'avant le crash, est ce qui fait du titre un véritable roguelike, avec toutes les mécaniques typiques du genre. Notre objectif sera d'atteindre un signal qui devrait nous permettre de sortir du piège. Au cours du voyage, Sélène rencontrera d'autres versions d'elle-même qui n'ont pas réussi lors des cycles précédents et pourra prendre des pistes audio des cadavres qui racontent des parties d'une tentative précédente (non vécues par le joueur) et nous font percevoir le désespoir de le protagoniste nous laisse dans un état constant de détresse. Grâce à un excellente narration « Montrez, ne dites pas » ce qui s'est passé sur Atropos est également raconté, où les vestiges d'une guerre totale sont immédiatement perçus (et matériellement vus).
Le passé de Selene sera également exploré grâce à des sections à la première personne (et parfois d'horreur) se déroulant dans une projection de l'ancienne maison du protagoniste, la femme revit ici des traumatismes qu'elle ne semble pas encore avoir complètement surmontés, nous les laissant découvrir au fur et à mesure de l'histoire. La narration se déroule toujours de manière très énigmatique, ce qui ne fera qu'augmenter la curiosité du joueur, mais aussi l'anxiété et la peur.
Entouré de dangers
Dès les premières minutes la sensation avec les commandes et avec les systèmes de mouvement et de tir est exceptionnelle, vous aurez l'impression d'avoir joué avec pendant des heures alors qu'en réalité vous faites encore vos premiers pas sur Atropo. Malgré cela, Returnal n'est pas un jeu simple et il ne sera pas difficile de mourir encore et encore au même endroit sans pouvoir avancer dans les différentes salles. Ces pièces, comme tout l'environnement, changeront à chaque tentative de manière désinvolte, nous laissant, surtout au début, désorientés et confus tout comme Sélène. Le jeu de tir est réactif et satisfaisant, donnant pas mal de satisfactions pour chaque coup tiré (également grâce au DualSense), en plus ces sensations sont amplifiées par l'excellent level design qui avec la progression du jeu développera également une verticalité importante. En effet, certains boss nous laisseront, une fois vaincus, des objets permanents (armes de mêlée, grappin...) qui nous permettront d'explorer les anciennes zones d'une toute autre manière, nous faisant découvrir de nouveaux objets et de nouveaux raccourcis.
Contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, Returnal fait de l'exploration l'une des pierres angulaires de l'aventure: le chemin à suivre sera toujours clairement balisé à travers la carte, mais on se retrouvera très souvent à devoir décider s'il faut s'écarter de l'itinéraire pour explorer des salles secondaires qui pourraient nous donner des bonus substantiels mais aussi de terribles malus. Housemarque a décidé de jouer beaucoup sur le facteur risque/récompense, et pas seulement en ce qui concerne les chambres secondaires ; en effet, de nombreux objets ou caisses contiendront un certain degré de "malveillance" qui pourrait nous causer un dommage plus ou moins grave s'il était collecté, ce sera à nous de décider si cela vaut le risque ou s'il vaut mieux partir cette ressource derrière.
Les créatures que nous devrons affronter sont également d'excellente facture, différentes pour chaque biome, et toutes avec un ensemble de mouvements différent à étudier et à apprendre. Lors des premiers combats, nous découvrons le système "Adrenaline", un compteur qui se chargera tous les trois tués jusqu'au niveau maximum de cinq, et qui pour chaque niveau nous fera obtenir un bonus statistique ou une mise à niveau des armes. Cependant, il faudra faire attention car dès que nous serons touchés le compteur reviendra à zéro nous faisant perdre tous les bénéfices obtenus. Les armes sont assez variées (pistolet, fusil, mitrailleuse, lance-roquettes...) et se découvriront et se déguiseront au fur et à mesure que vous avancerez dans les différents biomes, mais Sélène ne pourra en porter qu'une à la fois. Ceux-ci seront améliorés en fonction d'un niveau de "compétence" qui augmentera avec leur utilisation ou avec des objets dispersés sur la planète. Chaque arme aura un tir secondaire aléatoire qui sera déclenché en appuyant à fond sur le bouton L2, tout en appuyant sur la gâchette jusqu'au premier bloc de sa course, l'arme tirera avec un tir standard. Ce mécanisme peut sembler au départ peu intuitif et peut-être un peu contraint à maximiser l'utilisation de la manette PlayStation 5, mais il faudra très peu de pratique pour s'y habituer. Toujours le tir secondaire est le protagoniste cette fois d'un petit défaut : quand on est pris par l'action et par les innombrables lumières et lasers à esquiver, il ne sera pas facile de garder un œil sur son chargement, avec l'indicateur qui change pour chaque arme et il n'est jamais clairement visible. Cela peut entraîner plusieurs problèmes vu la puissance du tir secondaire (résout souvent les combats les plus durs), mais le problème est en partie réglé par l'audio (quand il ne sera pas couvert par les sons de la bataille) qui nous fera comprendre avec un son spécifique quand on sera de nouveau capable de l'utiliser.
Une fois l'histoire terminée, il sera possible de retourner explorer Atropos pour rechercher chaque lieu secret et chaque objet de collection ou curiosité concernant l'histoire de la planète. Des défis quotidiens sont également accessibles depuis Hélios, l'épave du vaisseau spatial de Selene, via l'ordinateur de bord. Ces défis consistent en des parcours à compléter avec une arme décidée par le jeu en marquant le plus de points possible puis en se plaçant dans le classements en ligne. Le online est aussi exploité, de manière asynchrone, lorsque l'on retrouve les cadavres d'autres joueurs qui peuvent être pillés en payant l'Éther (l'une des ressources les plus précieuses) ou vengés en affrontant un mini boss pour gagner de l'Éther.
Enfin, le DualSense !
Returnal est un régal pour les yeux, les différents biomes (six en tout) sont construits avec un soin incroyable, et donnent un impact extraordinaire. La première fois que vous visitez un nouvel environnement, il est impossible de ne pas être surpris. Cet effet est facilité par un secteur technique qui montre enfin quelques lueurs de next gen, en fait, Returnal pouvait difficilement fonctionner sur PlayStation 4 sans problème. Sur PS5, le titre essaie de passer en 4K dynamique, 60 FPS avec lancer de rayons mais, en fait, même ici, vous pouvez voir quelques petits problèmes de stabilité (qui seront probablement corrigés avec le patch Day1 arrivant le 30 avril). Il nous arrivait, de temps en temps, de tomber sur des chutes de trame assez visibles, en particulier dans les séquences avec de nombreux ennemis. Dans tous les cas, Returnal reste un titre visuellement incroyable, et ces gouttes de cadre ne tachent que superficiellement un secteur technique effrayant, entre explosions, vues à couper le souffle et un nombre impressionnant de particules à l'écran. Le son mérite également d'être mentionné, qui avec la technologie audio 3D enveloppe le joueur en lui faisant percevoir le danger dans toutes les directions, comme si la planète lui murmurait une infinie mélodie de mort.
Mais ce qui nous a le plus surpris, c'est le DualSense : enfin le nouveau contrôleur Sony est exploité correctement, atteignant les niveaux de la salle de jeux d'Astro. En plus du L2 susmentionné pour le tir secondaire, la gâchette droite fait également son travail en modifiant la résistance en fonction de l'arme que nous tenons et en se verrouillant lorsqu'elle est déchargée. Le retour haptique est encore plus impressionnant qui parvient à restituer toute sorte de sensation directement dans les mains du joueur. Pluie, boue, lasers, sauts et esquives, chaque action de Selene produira une vibration unique sur le contrôleur qui rendra l'immersion du joueur sur Atropos encore plus profonde.
Returnal est le jeu dont nous avions besoin, une nouvelle exclusivité PlayStation, pas encore un autre chapitre d'une série à succès, et surtout le premier véritable titre de nouvelle génération. Housemarque a osé ce qui est son projet le plus ambitieux et le plus complexe, et on peut dire avec certitude qu'un titre exceptionnel est sorti, de l'histoire au gameplay, du technique à l'artistique au secteur sonore. Un jeu qui vous piégera dans son inlassable répétitivité, et vous entraînera jusqu'au bout grâce à une histoire qui entremêle le passé, le présent et le futur du protagoniste sans jamais être trop didactique. Returnal n'est certainement pas un jeu pour tout le monde, mais n'importe qui devrait lui donner une chance et se laisser capturer par Atropos et ses endroits dangereux, terrifiants, mais en même temps d'une beauté à couper le souffle. Un monde dont il sera difficile de se détacher et qui vous bouleversera comme il a bouleversé Sélène. Ce n'est certes pas le jeu parfait, mais malgré ses petits défauts il réussit sans aucun doute dans ses intentions : divertir, fasciner et déranger. Comme lorsque divers malheurs frappent votre vie tous ensemble, l'un après l'autre, pour former un cycle infini dont il n'y a aucune issue de secours : c'est ainsi que vous vous sentirez en jouant à Returnal.
► Returnal est un jeu de type Shooter développé par Housemarque et édité par Sony Interactive Entertainment pour PlayStation 5, le jeu vidéo est sorti le 30/04/2021